SOUSTRACTION
- DETOURNEMENT DE BIENS
Cette infraction, dont un élu peut très bien
se rendre coupable, est prévue par les articles 432-15 et 432-16
du N.C.P. L'article 432-15 du N.C.P. réprime de 10 ans d'emprisonnement
et d'un million de francs d'amende, en sus de la peine d'inéligibilité,
le fait de détourner, détruire ou soustraire un acte ou un titre
ou des fonds publics ou privés, ou effets, pièces ou titres
en tenant lieu, ou tout autre objet relis en raison de ses fonctions
ou mission.
La
notion " d'acte ou de titre " englobe l'ensemble des textes
réglementaires pris par les autorités publiques, les documents
et écrits échangés entre les administrations ou entre les administrations
et les personnes privées et tout document confié par des personnes
privées à des dépositaires de l'autorité publique ou chargés
d'une mission de service public ( par ex., les actes authentiques
établis par les officiers publics en matière de registres d'état
civil d'une mairie).
Celle
de " fonds publics ou privés " regroupe les pièces de monnaie
et billets de banque qui appartiennent à l'Etat, à une collectivité
publique ou à des particuliers.
Le concept " d'effets, pièces ou titres en tenant lieu ", concerne
toutes les valeurs qui se substituent à la monnaie chèques,
lettres de change, billets à ordre, mandats de paiement, actions,
obligations, bons du trésor.
Le
terme " tout autre objet " se réfère enfin à tous les biens
mobiliers pouvant être déposés ou remis en raison des fonctions
ou missions exercées (ex. livres ou manuscrits d'une bibliothèque
publique).
En
tout état de cause, ces objets doivent se trouver en possession
de l'auteur du délit en raison de ses fonctions ou missions.
S'il s'approprie des fonds ou s'il soustrait un acte ou un titre
non remis dans le cadre de ses fonctions ou de sa mission, l'article
432-15 du N.C.P. est inapplicable puisque le délit de vol est
alors caractérisé.
La destruction, qui implique la destruction totale du bien remis
par tout moyen, ou le détournement, qui consiste à se comporter
en véritable propriétaire vis à vis du bien reçu, ne sont punissables
que si elles ont été réalisées intentionnellement. Une négligence
voire une erreur même grave écarterait l'application de l'article
432-15 du N.C.P.
L'existence
d'un préjudice n'est pas nécessaire pour caractériser le délit
de détournement de biens. En conséquence, le fait qu'il ait
été réparé est sans effet sur l'ouverture ou le maintien des
poursuites.
Enfin, il convient de relever l'existence d'une procédure particulière
applicable au détournement de fonds publics. Il s'agit de l'exception
préjudicielle de débat au jugement. Le juge pénal n'est en effet
pas compétent pour apprécier la réalité et le montant du déficit
en raison du principe de la séparation des pouvoirs. Il va alors
surseoir à statuer dans l'attente de l'apurement par la Cour
des Comptes, des comptes de la personne poursuivie.
Cette
exception ne fait cependant pas obstacle à la mise en mouvement
de l'action publique.
S'agissant
de l'article 432-16 du N.C.P, il réprime d'un an d'emprisonnement
et de 100.000 francs d'amende, en sus de la peine d'inéligibilité,
le fait pour un tiers de détourner, détruire ou soustraire les
biens énumérés par l'article 432-15 du N.C.P. suite à la négligence
de la personne dépositaire de l'autorité publique.
Le
détournement exige une remise préalable par la personne responsable
de la chose alors que la soustraction implique une appropriation
du bien sans autorisation préalable. La négligence de la personne
dépositaire de l'autorité publique s'entend au sens large :
il s'agit du défaut de surveiller, l'inattention, l'imprudence
dans la garde et la surveillance des biens confiés, en résumé
de la faute non intentionnelle, laquelle ne se présume pas et
doit dans tous les cas être démontrée.
Ainsi,
le 9 novembre 1998, la Chambre Criminelle a considéré qu'un
maire, qui avait signé des bons de commande et des factures
destinées à régler des acquisitions payées par la commune dans
l'intérêt personnel de la secrétaire de mairie, commettait de
graves négligences et s'abstenait d'accomplir les diligences
normales incombant à sa qualité de maire. Sa responsabilité
pénale a alors été retenue sur le fondement de l'article 432-16
du N.C.P.
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