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LA REPONSABILITE DES ELUS LOCAUX

Les manquements aux devoirs de probité

Il y a quelques années encore, il était assez exceptionnel que le juge répressif eût à connaître des infractions commises par les responsables ou fonctionnaires territoriaux.

De nos jours, la tendance est inversée et la fréquence des poursuites pénales est mise en exergue par les médias. Ce phénomène s'explique par une profonde évolution du droit pénal et du rôle dévolu aux collectivités territoriales.

Les lois de décentralisation ont en effet doté les collectivités de nouvelles attributions importantes comme par exemple, dans le domaine de l'urbanisme ou des marchés publics. En plus de 10 ans, elles sont devenues les premiers investisseurs de notre pays, suscitant ainsi la convoitise du secteur privé et le lancement d'opérations juridiques et économiques hasardeuses. Dans un contexte de crise économique et d'intense médiatisation des affaires, l'opinion publique a inévitablement manifesté sa volonté d'une plus grande transparence et moralisation de la vis publique.

Il convient de rappeler que le droit pénal sanctionnait déjà sévèrement l'élu en raison de la nature de ses fonctions. Mais, il bénéficiait alors tacitement d'un statut particulier qui le protégeait le plus souvent des poursuites pénales pour les infractions dont il pouvait s'être rendu coupable dans l'exercice de ses fonctions.

Jusqu'à la loi du 4 janvier 1993, il usait en effet d'un privilège de juridiction : lorsqu'il était mis en cause pour un crime ou un délit commis dans l'exercice de ses fonctions, l'affaire était obligatoirement renvoyée par le Procureur devant la Chambre Criminelle de la Cour de cassation qui désignait la juridiction chargée d'instruire et de juger l'affaire. L'infraction était ainsi jugée par une juridiction ne se trouvant pas dans sa juridiction.

En outre, il était communément admis que sa responsabilité était avant tout politique, la sanction étant en définitive électorale. Cependant, depuis quelques années, on assiste à une évolution législative importante visant à moraliser la vie publique et à responsabiliser davantage les collectivités territoriales et leurs élus.

Ainsi, on peut citer à titre d'exemple la loi du 3 janvier 1991 sur la transparence des marchés publics ou encore la loi dite anti-corruption, la loi Sapin du 29 janvier 1993. De nouvelles structures ont par ailleurs été créées. Ainsi, en juillet 1994, au sein du Ministère de la Justice, une Sous-Direction des Affaires Economiques et Financières auprès de la Direction des Affaires Criminelles est constituée en vue de lutter tout particulièrement contre la corruption. De même, la loi Sapin, précédemment citée, institue un service central de prévention de la corruption.

Le Nouveau Code Pénal n'échappe pas à ce courant novateur et moralisateur. Il instaure, à travers un article 121-2, la responsabilité pénale des personnes morales y compris de droit public. Désormais, à l'exception de l'Etat, toutes les collectivités territoriales et leurs groupements sont pénalement responsables des infractions commises dans l'exercice d'activités susceptibles de faire l'objet d'une convention de délégation de service public alors que les autres personnes morales de droit public (EPIC, EPA, GIP…etc.) le sont pour toute infraction commise dans l'exercice de leurs activités.

Cependant, leur responsabilité pénale ne peut être mise en œuvre que si elle est expressément prévue par le texte réprimant l'infraction en cause.
En outre, l'infraction doit avoir été commise par l'organe ou le représentant de la collectivité pour le compte de la personne morale elle-même c'est à dire qu'elle doit être liée au fonctionnement ou à la réalisation de la mission de la collectivité territoriale.

Une circulaire du 14 mai 1993 a ainsi rappelé " qu'une personne morale n'était pas responsable des infractions commises par un dirigeant dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, si ce dernier agissait pour son propre compte et dans son seul intérêt personnel, parfois même au préjudice de la personne morale elle-même. " Ainsi, une commune n'est pas pénalement responsable si son maire commet dans ses fonctions un détournement de biens à son seul profit. Par contre, s'il corrompt un entrepreneur aux fins d'obtenir indûment des prestations gratuites susceptibles de profiter à la collectivité, la responsabilité pénale de la commune peut alors être mise en jeu. L'infraction doit dès lors entrer dans le cadre de la mission de la personne morale.

Enfin, il n'est pas nécessaire que la personne morale ait tiré profit de l'infraction réalisée. Sa responsabilité pénale sera retenue que l'infraction a été commise ou tentée d'être réalisée. Cependant, en tout état de cause, leur responsabilité pénale n'exclut jamais celle des personnes physiques, auteurs ou complices des même faits. Le législateur autorise en effet le cumul des responsabilités pour éviter que la responsabilité de la collectivité territoriale ne constitue un écran aux fins de masquer le caractère délictueux des agissements personnels de ses élus.

Néanmoins dans deux cas au moins, seule la responsabilité pénale de la personne morale sera susceptible d'être mise en œuvre : il s'agit de l'hypothèse dans laquelle l'élément matériel imputable à un organe collégial sans qu'il soit possible de déterminer ceux de ses membres qui y ont effectivement participé (par exemple en raison de vote à bulletins secrets) et celle dans laquelle l'infraction consiste en un acte d'omission relevant d'un organe collégial.

Hormis ces deux cas, la responsabilité pénale de la collectivité s'accompagne le plus souvent en pratique de celle de soin représentant car elle suppose un acte répréhensible émanant de son organe ou représentant.

Ainsi, il ressort que les élus, tout en demeurant seuls responsables de leurs actes personnels, risquent également, dans bien des cas, par leur comportement fautif d'engager la responsabilité pénale de la collectivité territoriale elle-même et donc par-là même celle de ses administrés.(A titre d'exemple, la peine d'amende applicable aux personnes morales étant égale à 5 fois celle applicable aux personnes physiques, il est certain qu'en définitive, la pénalité sera supportée par le contribuable seul).

Selon le Nouveau Code Pénal, les élus viennent à manquer au devoir de probité attachée à leurs fonctions dans 5 séries d'hypothèse :
- en cas de prise illégale d'intérêts,
- en cas de corruption passive et de trafic d'influence,
- en cas de favoritisme,
- en cas de concussion,
- en cas de soustraction et de détournements de biens.

Seuls pour les deux derniers manquements, la responsabilité pénale des personnes morales peut être recherchée. (Circ. 14 mai 1993)